Dans la fraîche chaleur du printemps, Bruxelles frissonne. Ses rues frémissent dans la brise avrillée. Les chemises se décollettent, révélant des vallées que l’hiver avait oubliées. Les robes longues et légères aux allures estivales claquent au vent. Tous les corps se tournent vers le soleil, cherchant à se gorger de lumière. Dehors, les gens se parent de couleurs vives, sans doute afin d’amener plus vite à eux le mois de juillet, qui est encore si loin d’eux.
Auteur : Alexis
Tristan
Ce jour-là, Tristan s’était une nouvelle fois exilé afin d’oublier Iseut, celle qu’il aimait malgré lui. Il était dans une retraite secrète, loin des femmes qui, toutes, lui rappelaient par certains aspects celle qui lui manquait tant. Il regardait la nuit, et ses étoiles qui brillaient sans discontinuer depuis qu’il était né et qui brilleraient encore lorsque son nom ne serait plus prononcé par aucune voix. Ses yeux accoutumés à l’obscurité se posèrent sur l’âtre à côté de lui.
Sa vision se remplit de lumière. Ces flammes qui dansaient, tellement brillantes, le renvoyaient devant la dame de son cœur, sans qu’elle ne soit là. Il croyait pouvoir sentir son odeur de cannelle et de camphre. Il croyait pouvoir la serrer dans ses bras et joindre ses lèvres aux siennes. Il croyait pouvoir entendre son rire, doux comme le chant des oiseaux qu’on entend que là-bas, où le soleil brille plus longtemps et plus fort qu’en nos contrées. Il essaya de se jeter sur elle mais ne put y parvenir. Ce qu’il avait pris pour l’étincelle de son regard, ce n’était que le feu qui brûlait en face de lui, dont les flammes dansaient sans le réchauffer.
Tempus fugit
On nous a annoncé le retour du temps.
Cela veut dire que, ce soir, le monde va reprendre sa respiration, après un long moment d’arrêt. Le soleil s’est levé et couché de nombreuses fois sans qu’aucune nouvelle ne nous parvienne. Mais c’est pour très bientôt, dit-on. Sans que personne ne l’ait annoncé, la rumeur court sur tous les continents, à la vitesse du son. C’est comme si le temps s’annonçait de lui-même. Lire la suite
Désobéissance organisée (Article Pirate)
Article rédigé pour le site du Parti Pirate belge : http://lepartipirate.be/desobeissance-organisee
Il y a quelques semaines déjà, j’ai pris part à la manifestation organisée par les trois grands syndicats belges socialiste, libéral et chrétien. Nous étions plus de cent-mille ce jour-là à protester contre un gouvernement qui ne nous plait pas, pour plusieurs raisons :
- une politique d’austérité quand on sait que ce genre de mesures ne fonctionne pas, ou alors au détriment du bien-être de la population ;
- la trahison du MR qui forme une coalition avec la NVA malgré ses promesses de n’en rien faire durant les élections ;
- une sous-représentativité de la population francophone dans le gouvernement Michel, le MR ne représentant qu’une petite partie des francophones ;
- un sentiment d’injustice profond quand, pour combler les trous du budget, on préfère s’attaquer aux faibles revenus tout en faisant des cadeaux aux grosses entreprises.
Et ce ne sont là que les raisons les plus évidentes. On trouvait aussi dans cette manifestation des gens qui ne croyaient plus à l’alternance politique (si tant est qu’elle a jamais existé en Belgique), en la démocratie, en la représentation citoyenne par les élus, etc. et qui manifestaient leur désarroi.
Le Moine Copieur
Dans le silence de la salle du monastère, Lionel plongea sa plume dans l’encre, et, dans un mouvement souple, il posa la pointe sur le parchemin qui lui faisait face.
Le premier crissement marquait le début de la journée et était suivi de bien d’autres. Il aimait cet instant où il reprenait son travail là où il l’avait laissé la veille. Il relisait une première fois le manuscrit original à haute voix, puis il le plaçait à côté de lui, ouvert sur la page où il s’était arrêté. Il mettait son doigt sur la ligne exacte, puis commençait à écrire. Il prenait son temps pour recopier chaque lettre avec soin. Contrairement aux autres copistes, il le savait, il avait le luxe de ne pas devoir travailler dans l’urgence, pouvant se relire, voire même se corriger quand cela s’avérait nécessaire. Lire la suite
Passion d’été
– Où j’en suis ? Eh bien, comment dire… Lui ? Non, non, c’est fini, ça. Faut dire que cette histoire-là s’est terminée aussi vite qu’elle a commencé. J’avais juste envie de me changer les idées. Maintenant, je suis passée à tout à fait autre chose. Quelque chose de solide. Oui, il est beaucoup plus épais. Faut dire que le dernier était fin comme tout. C’est bien simple : j’avais parfois l’impression de pouvoir voir au travers. J’avais presque honte de sortir avec lui dans la rue.
« Mais avec celui-ci, oh ! je voyage. Il arrive vraiment à me faire rêver. La dernière fois, dans le métro, j’en ai presque oublié de descendre à mon arrêt, tellement j’étais absorbée. Hors du temps, quoi. Il m’absorbe. Puis, celui-là, j’aime particulièrement l’avoir contre moi pour m’endormir. Il est vraiment apaisant. Je reste penchée sur lui tant que je peux, puis, quand je sens mes yeux se fermer malgré moi, je m’abandonne au sommeil et retombe sur lui.
Crève-Cœur™
Je ne sais plus pourquoi je trainais au bar ce soir-là. Sans doute dans le but de terminer ma journée sur une note alcoolisée. Ou alors pour oublier les nouvelles débitées par la télévision quelques heures plus tôt. Seul, je me suis dirigé machinalement vers le comptoir, où une chaise haute n’attendait que moi. Je me suis assis et j’ai appelé le serveur. Je lui ai commandé je ne sais plus quelle boisson et, en attendant d’être servi, j’ai jeté un coup d’œil autour de moi : il y avait trois demi-douzaines de jeunes gens qui discutaient autour de tables bien pourvues en boissons, un couple de quarantenaires qui gazouillaient comme au premier jour, un pilier de bar dans un coin qui sombrait déjà dans des brumes éthyliques et un homme prostré à deux chaises de distance, le nez plongé dans son verre, comme pris dans ses pensées.
Le serveur m’a apporté mon verre dont je me suis saisi avant d’en savourer le contenu. La journée avait été aussi longue que chaude. Très vite, je me suis planté une oasis de fraicheur dans l’estomac avant de laisser l’alcool jouer son rôle de bienfaiteur. Pendant un moment, je me suis retrouvé seul avec mon verre, tandis que la musique se mêlait au brouhaha des conversations. Du bonheur. Je me serais presque cru des allures de bouddha atteignant un instant le nirvana.