Pourquoi choisir entre le bien-être des uns et celui des autres ? C’est une question que je me pose depuis longtemps, moi citoyen. Il y a quelque chose d’absurde dans ce choix que l’on nous propose.
Au départ, la distinction politique se faisait entre progressistes et conservateurs. Les uns étaient plus portés sur la réforme, les autres sur la conservation de l’état tel qu’il était. Avec la révolution industrielle, la distinction s’est faite entre socialistes et libéraux, respectivement à gauche et à droite dans l’hémicycle. Aujourd’hui, en Belgique et dans d’autres pays, on peut avoir l’impression que gauche et droite ne forment plus qu’un vaste centre mou. Les décisions se prennent comme on prend le thé. Seuls des événements marquants réussissent encore à faire bouger les choses. Pas toujours durablement. Pas toujours pour le bien du peuple.
En considérant la société comme divisée entre un patronat d’un côté et un prolétariat de l’autre, on comprend la distinction entre libéraux et socialistes. Seulement, comme toute frontière celle-ci est factice. La classe moyenne existe. Elle existe d’ailleurs de plus en plus fort. Elle ne fait pas que survivre, elle mange chaque jour à sa faim, elle a un logement fixe, elle peut se permettre des dépenses extraordinaires, etc. Elle s’interpose entre les deux autres classes et fait éclater le modèle politique post-industriel.
Le problème est que la classe moyenne est déchirée. Coincée dans son rôle de tampon, elle est tirée et tiraillée de gauche à droite et de droite à gauche. Elle ne se reconnaît pleinement dans aucun de ces partis, dont les racines se perdent dans un passé trop lointain. On place entre elle et le miroir de ses idéaux des prismes et des loupes. Il lui faudrait choisir entre la sécurité, la réussite, l’avenir de ses enfants, les droits humains. On lui dit qu’elle ne peut pas avoir l’un sans abandonner les autres. Elle ne se rend pas compte qu’une idée plus grande les englobe toutes. C’est cette idée-là qu’un pirate veut défendre.
Chaque pirate a à cœur des idées abstraites qui sont bien loin du concret de la vie quotidienne. Ces idées sont fondamentales et semblent acquises pour toujours. Rien n’est moins vrai. Elles sont terriblement fragiles et chétives face à leurs ennemis. Ces idées sont la liberté, la transparence et l’accès à la culture.
Liberté parce qu’elle est trop facile à restreindre. Certains pays n’hésitent pas à la brader contre un relatif sentiment de sécurité. Rappelons l’exemple des États-Unis d’Amérique, pays qui a voté une loi permettant de transformer un soupçon en preuve et un suspect en coupable sans intervention de la justice. Pour la sécurité de tous[1].
Accès à la culture parce que celle-ci reste le moyen le plus efficace de se réaliser en tant qu’Homme. C’est en ayant un panorama le plus large possible de ce que l’humanité offre que l’on peut le mieux choisir sa voie.
Transparence parce que les politiciens agissent comme des enfants, préférant cacher la vérité embarrassante en inventant de petits mensonges et en maquillant la réalité. Souvenons-nous que les gouvernements de l’Espagne, de la Grèce et d’autres comme eux n’ont pas hésité à enjoliver leurs bilans économiques pour éviter les foudres populaires.
Pour préserver ces valeurs, les pirates cherchent à rendre sa voix au citoyen. Il oublierait presque qu’il en a une, de voix. Cela fait tellement longtemps que les hommes au pouvoir ne les écoutent plus que beaucoup se sont découragés. Ils continuent d’améliorer la vie quotidienne dans leur coin, en oubliant la politique. Mais la politique n’oublie jamais personne. En tout cas, pas à moins de quelques millions d’euros. Oh ! la politique, contrairement à son nom, n’a jamais été vraiment affaire du peuple. Il s’agissait de gérer la cité pour ceux qui y habitaient, sans doute parce que la grande majorité était trop occupée dans les mines ou les champs et qu’ils ne savaient pas ce qui était bon pour eux. Mais aujourd’hui, près de soixante pour cent de la population belge possède un diplôme secondaire supérieur[2]. Avec ce niveau d’instruction, on pourrait considérer que la population est capable de se prendre en charge (surtout si on part du principe que ce n’est pas un bout de papier qui fait d’un être humain un être intelligent et responsable).
De plus, nous partons d’un constat terriblement banal : Internet existe. Ce réseau permet de communiquer des informations quasi instantanément d’un ordinateur à un autre. De plus, une population grandissante y a accès, grâce à une démocratisation du prix et à une certaine volonté d’étendre le réseau. Il touche logiquement de nombreuses sphères d’activité humaine dans notre société : travail, enseignement, etc.
Nous avons donc une population qui a les moyens intellectuel et pratique de prendre des décisions qui la concernent. Nous avons la possibilité de nous passer d’intermédiaires entre nous et le pouvoir. D’autant plus que, comme d’habitude, ce sont ces intermédiaires qui se goinfrent le plus, parce qu’ils se disent indispensables. Nous leur montrerons que nous pouvons nous passer d’eux. Il y a inutilité des anciens partis, les partis traditionnels. On a toujours aboli la tradition lorsque celle-ci avait perdu son rôle et qu’une majorité s’en rendait compte.
Le monde change. L’internet a déjà modifié de nombreux aspects de notre vie. Il effleure la politique. Les pirates sont là et proposent des idées pour que la transition se fasse en douceur. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, nous ne sommes pas des idéalistes. Nous sommes réalistes. Nous voyons que la réalité peut être augmentée et enrichie. Nous voulons profiter de cette occasion. Nous voulons que les citoyens ouvrent les yeux.
Et pour ça, nous sommes prêts à donner un peu de notre temps.
Notes :
[1] Vous n’étiez pas au courant ? Pourtant, ça commence à dater, cette histoire : http://fr.wikipedia.org/wiki/Patriot_Act
[2] En tout cas, c’est ce que raconte ce site qui affiche un pourcentage de 40% pour ceux qui ne possèdent qu’un certificat d’études primaires ou secondaires inférieures.