Dom Juan ou le festin de pierre

Le Dom Juan de Molière est une pièce étrange. Fascinante, même. Une comédie déguisée en satire. Ou peut-être une satire déguisée en comédie. Une œuvre fantastique avant l’heure par certains côtés. On côtoie tout le long de la pièce l’au-delà, les spectres et les revenants. À côté de ce va-et-vient entre monde des vivants et monde des morts, les escapades de Dom Juan peuvent paraître fades, mais ce sont ces péripéties qui feront toute la pièce.
L’intrigue est donc simple au possible. En Sicile, Dom Juan, incroyant et impie de surcroît, fuit Done Elvire qu’il a séduite et qui le lasse. Dans sa fuite, il rencontre une série de personnages et bouleverse le monde sur son chemin. Deux paysannes qu’il séduit sans difficulté, un mendiant qu’il tente comme un satan en guenilles et qu’il force à jurer pour un louis d’or, deux frères d’Elvire qui cherchent à le tuer et un des deux que Dom Juan sauve, une statue énigmatique d’un commandeur récemment tué, un père qui voudrait le voir revenir dans le droit chemin, un créancier qui aimerait être payé et un Sganarelle qui paie souvent pour les écarts de son maître. Tel est en vrac le contenu de Dom Juan, un irrévérencieux imbroglio qui tourne tout en dérision, même la mort. On comprend que cette pièce ait fait tiquer la critique à l’époque. Il n’y a rien de condamnable, si ce n’est Dom Juan qui tourne tout en dérision (l’amour, la mort, Dieu). Pourtant, il est puni pour ses crimes. Le génie de Molière intervient à cet instant, puisque le public ne peut s’empêcher d’éprouver de la sympathie pour ce mécréant et en vient presque à prendre son parti. Lire la suite

Share