Histoire avant l’heure : L’essor du financement participatif

Nous avons vu comment, dès le milieu des années nonante pour les premiers, l’internet s’est popularisé pour entrer dans de nombreux foyers. Souvenez-vous que durant les années deux-mille les réseaux sociaux s’étaient développés en masse. Nous avons montré également que ces différentes plateformes n’influençaient en rien la façon dont le réseau de connaissance pouvait s’étendre, mais qu’elles permettaient de renforcer les liens entre les membres d’un même réseau. Ils permettaient aussi d’augmenter de beaucoup l’audience des blogueurs et se faisaient le relais de l’information, plus rapide et parfois bien plus efficace que la télévision et la radiophonie.
On se souvient aussi que vers la fin des années deux-mille, toutes les banques de Belgique et des pays voisins disposaient d’un système de paiement par Internet. Les transactions étaient d’autant plus facilitées que les différents états étaient passés à l’euro et avaient ouvert leurs frontières en Europe. Les paiements se faisaient de plus en plus accessibles et rapides.
C’est dans ce contexte que le financement participatif s’est lui aussi développé. Il a bénéficié de l’amélioration du bouche-à-oreille (à cette époque, l’information commençait à circuler aussi vite de cette façon que par les moyens dits traditionnels) et de la virtualisation de l’argent. Au début des années deux-mille-dix, des projets cinématographiques, musicaux, événementiels, etc. ont été financés et ont vu le jour grâce à des sites de financement participatif. Du fait de la virtualisation monétaire, l’argent transitait bien plus facilement qu’auparavant. De petites sommes circulaient à grande vitesse et sur des distances parfois assez grandes.
L’événement déclencheur a eu lieu au milieu de ces années deux-mille-dix. À cette époque, une jeune diplômée espagnole, mère célibataire et dans une situation plus que précaire – malgré cinq ans d’étude en Communication d’entreprise – ne trouvait pas de travail. On sait qu’elle avait fait un échange étudiant avec une université du nord de l’Europe et un stage en France. On sait aussi qu’elle tenait un blog où elle racontait son expérience de demandeuse d’emploi et exposant ses idées de réforme entrepretariale, rassemblant près de sept-cents visiteurs journaliers.
Un jour, elle a lancé un appel aux dons, via une plateforme de financement participatif, dans le but avoué de pouvoir payer son loyer. Il lui manquait cinq-cents euros pour ne pas perdre son logement. Sa famille était dans l’incapacité de l’aider et elle expliquait qu’elle ne voulait pas contracter un prêt, ce qui aurait été, selon ses propres termes « mettre un doigt dans l’engrenage terrible du capitalisme ». Son appel a été suivi par une centaine de lecteurs de son blog et complété par des amis. Ceux qui avaient participé n’avaient dépensé qu’en moyenne quatre euros.
On se rappelle également qu’il s’agissait d’une époque où les différents gouvernements d’Europe organisaient leurs politiques d’austérité, réduisant les avantages des populations pauvres. Une cinquantaine d’amis ou de simples contacts qui avaient la chance de travailler décidèrent de lui donner deux à trois euros par semaine. Ce fut suffisant pour la jeune espagnole jusqu’au moment où elle trouva un travail.
En parallèle, des plateformes de micro-prêts se développèrent aussi. Des particuliers prêtaient de petites sommes sur lesquelles ils percevaient de légers intérêts pour des projets trop petits pour retenir l’attention des banques. Le principe était de pallier les défaillances du gouvernement d’un côté et des banques de l’autre, trop occupés avec la mondialisation.
Aujourd’hui, le processus s’est démocratisé, grâce à des moyens de paiement de plus en plus sécurisés : les sommes qui sont en mouvement sont trop petites pour intéresser les criminels. La sécurité financière passe par une communauté restreinte. Alors que le manque de transparence a toujours été un reproche au principe de redistribution des ressources par l’impôt, ceux qui paient pour d’autres savent aujourd’hui où vont leur argent. Cette décentralisation de l’aide financière a été une révolution qui, comme beaucoup d’autres, s’est faite en marge de la société, sans qu’on en parle.

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